Ed. Flammarion, 2022, 288 p.
Sonia Devillers raconte ici l’histoire de ses grands-parents maternels Harry et Gabriela Deleanu qui ont quitté la Roumanie en 1961 dans des conditions particulières.
Gabriela , née Sanielevici en 1912, est issue d’une famille roumaine juive d’intellectuels. Brillante, séduisante, elle maniait l’allemand et le français et était aussi férue de musique.
Harry, né Greenberg aux Etat-Unis où ses parents d’origine roumaine avaient émigré avant de revenir en Europe en 1908 sans reprendre leur ancien patronyme Grunberg. Harry poursuit des études d’ingénieur en Italie.
Ils se marient en 1935 et s’installent à Bucarest où Gabriela enseigne le français et Harry est employé comme ingénieur à l’usine Gallia.
De 1927 jusqu’à la deuxième guerre mondiale, existait dans le royaume de Roumanie, la Garde de Fer, mouvement et parti nationaliste révolutionnaire fasciste, dirigé par Cornéliu Codreanu.
En 1938, ce dernier est assassiné et remplacé par le maréchal Antonescu qui perpétua le régime totalitaire antisémite.
En 1940, la Roumanie s’engage ans la guerre auprès d’Hitler. Les massacres envers les juifs se poursuivent ; la population juive qui était d’environ 750000 personnes en 1930 est passée à 350000 personnes en 1944 quand les soviétiques ont pris le pouvoir.
Le régime communiste n’a pas enrayé la baisse de la population juive, mais l’a accentuée par « l’exportation de juifs ».
Gabriela et Harry se trouvent déchus de leurs fonctions, Harry échappe de justesse au camp de concentration. Ils prennent alors le nom de Deleanu « qui fait plus roumain » et ils n’ont plus qu’une idée en tête : fuir la Roumanie.
Gabriela et Harry avec leurs deux filles et la mère de Gabriela ont été échangés, moyennant une certaine somme contre du bétail « à haut rendement » en 1961 et ont pu rejoindre la France.
De cette histoire, Sonia Devillers n’en savait pas grand-chose, ses grands-parents ne parlaient pas beaucoup de leur histoire.
Elle a donc mené une véritable enquête en Roumanie, reconstitué la filière « d’exportation » dans laquelle le passeur Henry Jacober, lui-même juif installé à Londres avait des relations privilégiées avec le gouvernement roumain.
Un livre passionnant qui nous plonge dans ce sombre passé pas si lointain.
Chantal Berthet-Bondet
Editions du Seuil, 2003, 372 p.
Il s'agit de l'histoire romancée de l'estimation de la circonférence de la terre par Eratosthème, un mathématicien grec alors directeur de la Grande Bibliothèque d'Alexandrie, au 3ème siècle avant notre ère.
Pour ce faire il fit mesurer, avec l'aide d'un soldat entrainé à faire des enjambées d'une longueur constante, la distance séparant Alexandrie d'un point situé sur le même méridien et sur le tropique du Cancer, possédant un puit pouvant attester du moment où le soleil est au zénith au solstice de printemps et donc éclaire le fond du puits. Pendant ce temps à Alexandrie la mesure de l'angle du soleil avec la verticale est régulièrement notée et permet de connaitre à la date du solstice la valeur de cet angle. L'auteur explique le calcul effectué pour en déduire la circonférence de la terre. Le résultat trouvé a été de 39'600 km alors que la valeur admise actuellement est de 40'000 km.
En plus de l'histoire de cette mesure et des péripéties qui l'ont accompagnée, ce livre, très agréable à lire, raconte la vie à Alexandrie à cette époque et les luttes de pouvoir à la cour.
Guy Bernard
Editions Robert Laffont, 1999, 326 p. Nouvelle édition, Lons-le-Saunier, La Belle Etoile, 2022, 288 p.
Jean Carrière (1928-2005), Prix Goncourt en 1972 pour l’Epervier de Maheux, a écrit une vingtaine de romans. Il est ensuite tombé dans l’oubli, avant d’être republié par les Editions de la Bonne Etoile de Lons le Saunier.
De retour de la Première Guerre Mondiale dans son village cévenol, Pierre-Ezéchiel obtient du maire un terrain ingrat. Personne ne comprend la raison de cette demande. Situé dans un vallon, c’est une sorte d’amphithéâtre avec des « traversiers », terrasses en gradins. Il commence à restaurer ce lieu hanté par des luttes camisards, pour en faire un jardin pour l’Eternel. Le travail entrepris est colossal. Quelle obsession l’appelle ? Que dire de l’acuité grandissante de ses sens et de son éloignement de sa famille ?
Ce livre, très bien écrit, laisse une trace émouvante et mémorable chez le lecteur.
Elizabeth Meuret
S. Mârai (1900-1989) était un journaliste et auteur hongrois. Issu de la petite noblesse catholique, fait dont il était très conscient, il se marie jeune avec Lola qui est juive. Ils perdent leur seul enfant quand il n’a que quelques mois mais ils adoptent un petit garçon de leur entourage. Il s'exile en Italie en 1948, puis aux Etats-Unis en 1952 où il décède; il reviendra en Italie entre 1967 et 1980. Ses romans, faciles à lire, sont très détaillés et traduisent son état d’âme un peu dépressif, et sa déception du peuple hongrois. Pour apprécier cet auteur, peut-être faut-il un esprit « Mitteleuropa » ?
Il est l'auteur de plus de 25 romans, de 9 recueils de nouvelles, 6 de poésie, de texte pour le théâtre ou la radio, de 4 essais, de 2 mémoires, de 3 récits de voyage, etc. Son journal personnel, en 6 volumes à l'origine, est traduit en français en 2 tomes :
"L'œuvre de Sándor Márai est maintenant considérée comme faisant partie du patrimoine littéraire européen et jouit d'une réputation semblable à celles de Stefan Zweig de Joseph Roth et d' Arthur Schnitzler. Comme eux, il est un des grands écrivains du 20e siècle l'un des derniers représentants de la culture brillante et cosmopolite de la Mitteleuropa emportée par la défaite de l' Empire austro-hongrois et par les totalitarismes. Cet intellectuel idéaliste écrivait dans Les Confessions d'un bourgeois : « Tant qu'on me laissera écrire, je montrerai qu'il fut une époque où l'on croyait en la victoire de la morale sur les instincts, en la force de l'esprit et en sa capacité de maîtriser les pulsions meurtrières de la horde. »
En 1990, Sándor Márai a reçu, à titre posthume, le prix Kossuth, la plus haute distinction hongroise." (Extrait du site internet Sandor Marai, Wikipédia.)
Elizabeth Meuret
Edition Folio, 2007, 208 p.
Biographie de Jean-Baptiste Pussin (1745 – 1811), né à Lons-le-Saunier, tour à tour tanneur, militaire, puis précurseur des infirmiers psychiatriques. Partisan des méthodes douces envers les aliénés, il les a écoutés et libérés de leurs chaînes avec d’excellents résultats. Il a vivement intéressé Philippe Pinel, un des premiers médecins aliénistes, avec lequel il a travaillé à la Salpétrière.
Voici un Lédonien guère honoré par sa ville d’origine, contrairement aux 17 hôpitaux, unités de soins, centres et établissements divers qui perpétuent son souvenir. Une rue de Lons-le-Saunier devrait porter son nom.
Texte extrait de la dernière de couverture, de Marie Didier :
« Taciturne, secret, toujours obscur (l'histoire officielle ne s'étant pas privée de t'effacer simplement de ses étagères glorieuses allant jusqu'à écorcher souvent l'orthographe de ton nom), j'ai guetté la trace en apparence la plus insignifiante de ta vie. Le détail le plus fugace devenait pour moi lueur dans les ténèbres de ton existence.
Tu as connu la maladie, les humeurs froides comme on disait alors en parlant de la tuberculose qui a mis ta vie en péril : j'ai séjourné plusieurs années en sanatorium où j'ai failli mourir. Tu es devenu soignant ; je suis devenue médecin.
Là s'arrête ce qui nous unit, mais plus tard, en avançant vers toi, je découvrirai autre chose qui me fera ne plus vouloir te quitter : par esprit de survie, par nécessité, par intelligence, par compassion innée, tu as su prendre des chemins difficiles, de ceux que presque personne jusque-là en France n'avait osé fréquenter. »
Abrupt avec le pouvoir, à la fois ferme, généreux et non violent avec les insensés, Jean-Baptiste Pussin, simple garçon tanneur franc-comtois devenu « gouverneur des fous » de Bicêtre, s'oppose, dans sa façon de les traiter, à la doxa de l'époque. Il jouera un rôle, oublié aujourd'hui et pourtant essentiel, dans l'histoire de la psychiatrie.
Bernard Leroy
Edition Michalon, 2021, 286 p.
Titre qui surprend : un oxymore… Comment concilier l’autonomie, la liberté de choix du citoyen-patient dans un système de santé produisant de la solidarité ?
L’auteur, au sein de l’Institut Santé, a conduit une réflexion, depuis trois ans, avec un collectif, tous experts dans leur domaine : professionnels de santé, politiciens, le monde associatif, des patients partenaires.
La réflexion livrée dans ce livre montre comment construire un nouveau système de santé, aujourd’hui dégradé, pour assurer trois transitions indispensables : démographique (allongement de la vie), épidémiologique (poly-pathologies des personnes sur un temps long), technologique (traitements de plus en plus performants mais très onéreux, nanotechnologies, intelligence artificielle, télémédecine,…)
Le nouveau système de santé faisant émerger le concept d’Autonomie Solidaire en Santé est, pour l’auteur, la seule réforme possible.
Ce livre ouvre un horizon d’optimisme réaliste qui invite à en faire la lecture pour sortir de la fatalité ambiante actuelle.
Claude Camus.
Le geste noir, 2020, 276 p.
Née en 1961 à Paris d’une vieille famille jurassienne, Line Dubief est ingénieur d’études à l’université de Franche-Comté. Passionnée de romans policiers, elle s’est lancée avec succès en écriture. Disparition sur Oléron est son 4e livre. Le commissaire Eustache est en vacances sur l’île d’Oléron. Il décide de reprendre une enquête pour tenter de retrouver, 23 ans après sa disparition, à l’âge de 5 ans Alice. Celle-ci est la fille de Mathilde dont l’espoir de retrouver son enfant décide le commissaire à se lancer sur les traces de la fillette disparue. Agréable à lire, une étonnante histoire …
Line Dubief a écrit d'autres romans policiers se déroulant à Besançon.
Marie-Jeanne Roullière-Lambert
Dole, Les Editions de La Passerelle, 2022, 300 p.
Cet ouvrage, très agréable à lire et illustré, de façon à la fois rigoureuse et très vivante, propose 7 promenades, itinéraires, sur les traces des personnages de Marcel Aymé mais encore plus sur celles de l’écrivain. On découvre ainsi à quel point le Jura a nourri l’écriture de ce jeune auteur. Cet ouvrage permet une lecture buissonnière dans les rues de Dole, au village de Villers-Robert et dans la campagne environnante.
Marie-Jeanne Roullière-Lambert